Encore en confinement, cinéastes, actrices et acteurs français ont répondu, au fil de cette collection d'entretiens "Gardons le lien", aux questions de journalistes internationaux pour qui le cinéma français reste une voix et un regard qui portent loin.
Pour cette nouvelle interview à distance, UniFrance a mis en relation le compositeur Alexandre Desplat et le journaliste brésilien Rodrigo Fonseca (c7nema, O Estado de Sao Paulo).
Rodrigo Fonseca : Quelle a été l'importance de la musique populaire brésilienne dans votre formation musicale ?
Alexandre Desplat : La musique brésilienne fait partie de mon éducation musicale depuis que j'ai 13 ans. Je chantais dans la chorale de mon quartier, et nos chefs d'orchestre, qui étaient mexicains, nous faisaient chanter aussi bien des classiques comme les œuvres de Jehan Tabourot ou Guillaume de Machaut que "La Bamba" ou "Desafinado". C'est à cette époque que je me suis acheté mon premier disque de bossa nova, qui s'appelait "Braziliana" et qui contenait des titres de João Gilberto, Tom Jobim ou Luis Bonfá. Ma passion pour cette musique, aux harmoniques et aux rythmes sophistiqués, m'ont "infecté", et à 17 ans j'ai rejoint un groupe de bossa avec lequel j'ai pu jouer tous les merveilleux standards. J'achetais tous les disques que je pouvais. Plus tard, j'ai fait venir Mauricio Einhorn à Paris en 2000 pour enregistrer avec lui la musique d'un film de Philippe De Broca. J'aurais tellement aimé être à Rio entre 1960 et 1970...
Que pouvons-nous attendre de vos compositions pour la bande originale de The French Dispatch, de Wes Anderson ?
Chaque musique composée pour Wes est une expédition vers quelque chose de nouveau, une découverte. D'abord, nous examinons la manière dont le film devra "sonner". Choisir les instruments, les assembler, est aussi important que la mélodie. Pour The French Dispatch, nous n'avons pas suivi de règle formelle. Vous y découvrirez, une fois de plus, un choix inattendu d'instruments. Également inattendue sera la façon dont la musique intervient tout au long du film.
Vous avez été président du Jury à Venise, vous avez même été acteur. Est-ce que vous avez envie de réaliser un film ?
Réaliser un film, c'est une tout autre aventure. C'est quelque chose que j'aurais fait il y a longtemps si je m'en étais senti capable. Mais le travail d'un compositeur... c'est de composer. C'est la musique qui me fait vibrer. C'est la musique qui me fait travailler 18 heures par jour. Le cinéma évolue avec la société et la musique de film doit évoluer avec lui. Mais l'évolution ne doit en aucun cas signifier appauvrissement.
De quels musiciens, ou chanteurs, conseilleriez-vous l'écoute pendant ce confinement ?
Je vis à Paris, dans le quartier du Marais, et j'espère toujours croiser Chico Buarque parce que je sais qu'il a un appartement dans le coin.
Et pourriez-vous nous conseiller un film ?
Amarcord, de Federico Fellini, et sa poésie musicale signée Nino Rota.