Actuellement en fabrication, le public et les professionnels présents aux Festival et Marché du film d’animation d’Annecy pourront découvrir en exclusivité le premier épisode de la série d’animation Samuel, présentée le 15 juin en présence de sa réalisatrice Emilie Tronche. Damien Megherbi, producteur de la série chez Les Valseurs, nous raconte comment il a découvert ce personnage si attachant et amorcé une collaboration avec son autrice pour le développer et le porter sur les écrans, de télévision mais aussi numériques, français et étrangers.
Unifrance : Comment le personnage de Samuel est-il né et comment l’avez-vous découvert ?
Damien Megherbi : En juin 2020, je vois une vidéo apparaître dans mon fil d’actualité sur les réseaux sociaux, postée par une certaine Émilie Tronche. Je clique et découvre la tranche de vie, en animation, d’un petit garçon qui s’appelle Samuel et est amoureux d’une fille de sa classe, Julie. Je suis touché, je sens la vision unique d’une autrice, il y a un style et une écriture à la fois épurés, et pourtant de cette épure et de la liberté de l’animation, il naît quelque chose de fort. Il y a notamment une séquence musicale, accompagnée par un titre d’ABBA, qui fait jaillir l’émotion. J’écris alors à la réalisatrice, Emilie Tronche.
Elle a développé cette idée à la fin du premier confinement, juste après avoir terminé le court qu’elle réalisait dans le cadre de la collection "En sortant de l’école" pour France Télévisions, après avoir été diplômée de l’EMCA à Angoulême. Cette idée lui est venue de manière assez spontanée, en s’appuyant sur des souvenirs d’enfance. Emilie n’a pas encore l’idée d’en faire une série, mais elle réalise deux autres épisodes avec un souffle aussi fort que le premier.
Je ne pense pas tout de suite à un format sériel de mon côté non plus, mais j’ai envie de travailler avec Emilie. L’idée de développer une série digitale me vient un peu plus tard et nous commençons à y travailler ensemble. Comme la série repose beaucoup sur la musique et la danse, nous avons alors l’idée de développer des épisodes spécifiquement pour TikTok.
Pouvez-vous nous résumer le concept de la série en quelques phrases ? À quelle cible s’adresse-t-elle ?
DM : On suit donc un petit garçon qui s’appelle Samuel, qui raconte son quotidien, aussi banal qu’extraordinaire, dans un journal intime. On le voit évoluer de sa dernière année d’école primaire, dans la première partie de la saison, à son entrée au collège, dans la seconde partie.
C’est un récit touchant, raconté avec l’innocence de l’enfance, qui résonne aussi bien pour les pré-adolescents et adolescents par identification, que pour les jeunes adultes et adultes par nostalgie. Il y a une grande subtilité dans l’écriture et la mise en scène et beaucoup de profondeur derrière l’apparente naïveté. La série peut être regardée à partir de 9 ans, mais on y prend beaucoup de plaisir en tant qu’adulte aussi. On peut considérer que le cœur de cible est les adolescents et les jeunes adultes, mais nous avons testé la série sur des publics d’âges divers, des plus jeunes aux adultes, avec des retours toujours très enthousiastes.
Quelles sont les singularités, les originalités de la série ?
DM : Il s’agit d’un format innovant, en double série. D’un côté, un premier format audiovisuel de 21 épisodes qui ne durent chacun que 4’15''. Dans sa version formatée, la série audiovisuelle peut être diffusée en linéaire, mais aussi sur les réseaux sociaux. De l’autre côté, il y a une seconde série dédiée à une diffusion purement numérique. Ce second format a été écrit et développé pour le réseau social TikTok, avec les mêmes univers et personnages que la série audiovisuelle, mais avec des épisodes verticaux, une narration plus simple et une durée inférieure à 1 minute pour chacun des 20 épisodes qui constituent cette seconde série. Ces épisodes peuvent être regardés indépendamment de la série audiovisuelle. Ils peuvent être également vus séparément les uns des autres et dans le désordre, ce qui correspond aux usages de TikTok.
Ce second format diffusé sur TikTok peut permettre d’intéresser un public plus jeune, en espérant qu’une partie de ce jeune public soit curieux de découvrir ensuite la série audiovisuelle. Cette série audiovisuelle a un arc narratif plus conséquent qui se déploie sur 21 épisodes. En France et en Allemagne, elle sera diffusée sur la plateforme Arte.tv, mais aussi sur YouTube et le compte Instagram d’Arte : @arte_asuivre. En Espagne, la série sera adaptée et diffusée en linéaire par la chaîne nationale RTVE et également par la chaîne Televisio Catalunya en Catalogne.
Nous sommes convaincus que cette double série, audiovisuelle et digitale, par la fraîcheur de son écriture et ses multiples modes de diffusion, va pouvoir atteindre, notamment sur les réseaux sociaux, un public qui ne regarde plus vraiment la télévision de manière linéaire.
En même temps, la série se déroule dans les années 2000, dans une époque d’innocence, avant la révolution numérique, et va ainsi susciter un sentiment de nostalgie qui peut permettre d’emporter l’adhésion d’un public plus adulte.
Emilie est entourée d’une équipe pour l’animation de la série, mais c’est elle qui donne sa voix à tous les personnages, ce qui constitue une autre originalité de cette série.
En plus de l’animation, la musique a une place très importante dans la narration…
DM : Emilie Tronche a pensé toutes les animatiques et la narration de la série en fonction des titres qui composent la playlist de cette double série.
Souvent, quand le personnage veut raconter un passage particulier de son quotidien et n’arrive pas à exprimer ses émotions, on s’échappe du réel par la magie d’une séquence animée qui mêle musique et danse, avec parfois des instants poétiques suspendus. Une bande originale marquante accompagne l’ensemble de la série. C’est par exemple le titre "The Winner Takes it All" de ABBA qui accompagne le moment-clé du premier épisode. Il y a dans chaque épisode un morceau iconique qui accompagne ainsi un moment fort. Dans la version TikTok de la série, il y a même certains épisodes qui sont de pures chorégraphies. Nous allons acquérir les droits musicaux pour une diffusion en linéaire et internet dans le monde entier à l’exception des États-Unis. Nous avons une option pour étendre les droits sur ce territoire que nous pourrons confirmer en fonction des opportunités de diffusion.
Quels sont les partenaires réunis autour de la série ? Qu’est-ce qui les a convaincus, Arte notamment ?
DM : Alors que nous avions débuté le développement de la série, nous avons été contactés par l’équipe du pôle numérique d’Arte France qui avait aussi vu les premiers essais postés par Emilie sur les réseaux sociaux. Nous avions l’idée de décliner la série avec une version TikTok et cette idée a plu à Arte qui était sur le point de lancer un compte sur ce réseau social. Nous avons ensuite travaillé avec Arte pour développer plus en profondeur la série audiovisuelle sur une vingtaine d’épisodes. Je tiens à remercier Marianne Lévy-Leblond, Lili Blumers et Guillemette Trognon pour la confiance et la liberté créative qu’elles nous ont offert, leur grande compréhension des spécificités de cette série unique et en même temps toute l’expertise apportée, notamment la connaissance des publics des réseaux sociaux, les usages et les fonctionnalités qui pouvaient avoir un impact créatif.
En septembre 2021, nous avons présenté la série en développement au Cartoon Forum à Toulouse. Ce fût un succès aussi grand qu’inattendu, avec une standing-ovation à la fin du pitch. C’est à ce moment que l’intérêt des chaînes espagnoles s’est manifesté, et nous nous sommes lancés dans l’adaptation de la série en espagnol et catalan, avec Pikkukala comme coproducteur espagnol. Les chaînes espagnoles ont souhaité diffuser la série audiovisuelle en linéaire. Nous avons donc travaillé sur une version avec des durées d’épisodes standardisées pour la série audiovisuelle, nous n’avions pas cette obligation pour Arte qui prévoit une diffusion uniquement numérique en France et en Allemagne.
En parallèle, nous avons commencé le financement de la double série et nous avons in fine eu le soutien de la région Nouvelle-Aquitaine, de la Charente, de la Mairie de Paris, de Pictanovo, de la région Réunion, de la Procirep et du CNC via de multiples fonds. Nous avons eu des retours dithyrambiques sur le projet à chaque présentation.
La série est actuellement en fabrication, et nous montrerons pendant le festival d’Annecy le premier épisode. Pour l’acquisition des droits musicaux, nous travaillons avec Cristal.
Quels sont les atouts de Samuel pour aller à la rencontre du public international ?
DM : C’est une série avec une dimension universelle, sur le passage de l’enfance à l’adolescence. La version originale est ancrée et référencée en France, mais cela ne pose jamais de problème de compréhension. Il y a une écriture et des émotions qui peuvent parler à tout le monde. En Espagne, nous travaillons sur une véritable adaptation, avec traduction, voix espagnoles, mais aussi modifications de certaines musiques ou références françaises. Cela nous ouvre un potentiel de diffusion dans les pays d’Amérique du Sud et d’Amérique centrale. Nous avons des premiers intérêts en Australie, au Québec, en Finlande et l’idée de produire également une version anglaise internationale.
C’est aussi une série avec une vision d’autrice, proche de la ligne éditoriale que Les Valseurs a développé dans ses projets cinématographiques. Même s’il a fallu faire rentrer la créativité d’Emilie Tronche dans un processus plus industriel, avec une équipe d’animation autour de la réalisatrice, pour produire 100 minutes d’animation, à Angoulême, Paris, Tourcoing et Barcelone, la démarche d’autrice d’Emilie demeure au cœur de la série et cela donne la possibilité à Emilie d’incarner la série et de créer une proximité avec un public jeune partout dans le monde.
Il y a ainsi un grand potentiel d’engagement des publics autour de la série et également la possibilité de créer une propriété intellectuelle qui pourrait donner lieu à des œuvres dérivées. Par exemple, nous avons déjà des intérêts d’éditeurs pour une adaptation en roman graphique.
Quelles sont vos ambitions pour Samuel après cette sélection à Annecy ?
DM : La projection officielle du premier épisode de la série audiovisuelle aura lieu le 15 juin à Annecy, en présence d’Emilie Tronche. La diffusion par Arte est prévue fin 2023. Notre objectif à Annecy est d’intéresser des diffuseurs étrangers, pour anticiper également des besoins d’adaptation ou de doublage. Il serait idéal d’obtenir des préventes lors du festival. Pour le moment, nous ne sommes pas associés à un agent de ventes, même si nous avons des intérêts et que nous ne l’excluons pas pour la suite.
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