Synopsis
"A l'ère de "L'Economic Airline", des Américaines effectuent un voyage organisé. Au programme : une capitale par jour. Arrivées à Paris elles s'aperçoivent que l'aéroport est exactement le même que celui qu'elles viennent de quitter à Rome, que les routes sont les mêmes qu'à Hambourg et que les lampadaires ressemblent étrangement à ceux de New York. Si bien qu'en fin de compte, le décor n'a pas changé d'une ville à l'autre. Elles évoluent dans ce décor international qui existe réellement, je ne l'ai pas inventé. Petit à petit, elles rencontent des Français. Une petite chaleur humaine se crée, ce qui leur permet, à défaut d'être dans un décor "parisien", de passer 24 heures avec des parisiens et, parmi eux, Monsieur Hulot."
Générique
Réalisateur (1)
Acteurs (29)
Production et distribution (4)
- Production déléguée : Specta Films C.E.P.E.C. - Les Films de Mon Oncle
- Production étrangère : Jolly Film
- Exportation / Vente internationale : Carlotta Films
- Distribution France : SN Prodis
Générique détaillé (14)
- Scénaristes : Jacques Tati, Jacques Lagrange
- Directeurs de la photo : Jean Badal, Andréas Winding
- Auteur de la musique : Francis Lemarque
- Assistants à la réalisation : Henri Marquet, Marie-France Siegler-Lathrop, Nicolas Ribowski
- Monteur : Gérard Pollicand
- Ingénieurs du son : Jacques Maumont, Gilbert Pereira
- Costumes : Jacques Cottin
- Producteur : Bernard Maurice
- Producteur associé : René Silvera
- Directeur de production : Michel Chauvin
- Monteur son : Maurice Laumain
- Scriptes : Sylvette Baudrot, Lucile Costa, Marie-Thérèse Cabon
- Décors : Eugène Roman
- Photographe de plateau : Jean-Louis Castelli
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Mentions techniques
- Type : Long-métrage
- Genre(s) : Fiction
- Sous-genres : Comédie
- Thèmes : Urbanisme, Travail, Ville, Architecture, Anticipation, Avenir
- Langue de tournage : Français, Anglais, Allemand
- Origine : France
- EOF : Oui
- Nationalité : 100% français (France)
- Année de production : 1967
- Sortie en France : 16/12/1967
- Durée : 2 h 5 min
- Etat d'avancement : Sorti
- Numéro de visa : 24991
- Visa délivré le : 15/12/1967
- Agrément : Oui
- Formats de production : 70 mm
- Type de couleur(s) : Couleur
- Cadre : 1.85
- Format son : Stéréo
Box-office & sorties
Box Office
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Diffusion TV
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Sorties à l'international
Pays | Distributeur | Acheteur | Date de sortie | Titre local |
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Actualités & distinctions
Actualités (1)
Sélections (6)
A propos
Commentaire
Échec commercial à sa sortie, éreinté par certains critiques comme Henry Chapier qui le qualifie de « navet monumental », il est considéré par beaucoup comme le chef-d'œuvre du cinéaste et même, pour certains (David Lynch par exemple), comme l'un des plus grands films de l'histoire. C'est un film ambitieux dans sa forme (dialogues secondaires, mouvements géométriques et circulaires millimétrés frôlant l'abstraction, jeux de reflets incessants, métaphores enchaînées) et qui fut toutefois salué à sa sortie par Le Monde ou Le Nouvel Observateur.
Tati s'était montré extrêmement perfectionniste au cours du tournage, au point d'épuiser parfois son équipe. Il avait fait reconstituer une ville moderne entière (« Tativille ») sur un terrain vague près des Studios de Joinville-le-Pont, par une centaine d'ouvriers en bâtiment qui utilisèrent 1 200 m2 de vitres, 3 500 m2 de revêtements plastiques, 3 000 m3 de bois et 45 000 m3 de béton. Le tournage dura près de trois ans (octobre 1964 à octobre 1967). Plus tard, il voulut transformer ces décors en une école de cinéma, certains producteurs l'ayant sollicité pour y tourner d'autres films. Les autorités en charge des terrains et de Joinville ne lui laisseront pas l'occasion d'y rester, Tati sera chassé, et par dépit, il jettera le manuscrit de son scénario sous les décors au cours des opérations de démolition, lancées malgré la promesse d'André Malraux qu'ils pourraient être recyclés à d'autres usages.
Du fait de l'échec commercial (refus du marché américain de le distribuer en dépit de son Oscar pour Mon oncle) et du coût énorme du film (entre 30 et 100 millions d'euros actuels selon le critique Stéphane Goudet), la société de production de Tati fit faillite et ce dernier fut un temps dépossédé de ses droits : il mettra près de dix ans à essayer de recouvrer son indépendance financière, mais la maladie le rattrapera. Il put néanmoins dans la foulée réaliser deux autres films, dont Trafic avec l'immortel Monsieur Hulot.
D'un point de vue critique, il est utile de rapprocher ce film d'une autre œuvre mettant en scène la ville, Metropolis de Fritz Lang, Alphaville de Jean-Luc Godard.vOn peut également voir la séquence concernant la fête du Royal Garden comme une inspiration forte du film The Party de Blake Edwards.
Le 70mm
Playtime est l'un des rares films français à avoir été tourné en 70 mm. À ce sujet Tati s'explique ainsi dans le dossier de presse de l'époque : « Si je tourne en super 8, je vais filmer une fenêtre, en 16 mm je vais en avoir quatre, en 35 mm je vais en avoir douze et en 70 mm, je vais avoir la façade d'Orly. »
Ceci lui permet de montrer la démesure de l'architecture par rapport à l'homme.
C'est aussi pour lui, un moyen de faire participer le spectateur, le 70 mm permet d'« ouvrir une fenêtre, une baie sur ce qui nous entoure, que les gens [...] se parlent carrément, se montrent les endroits, les objets : - Tiens regarde là, regarde... - Quoi ? - T'as vu, regarde là, y a un avion qui fond » (citation extraite des Cahiers du cinéma de septembre 1979).
Restauration
Le film a été restauré en 2002 par François Ede. Cette opération a coûté plus de 800 000 euros.
Source : Wikipedia
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Point de vue
Proposer, en 1967, un temps pour le jeu relève manifestement d'une autre stratégie que celle choisie par Godard lorsqu'il tourne La Chinoise cette même année.
Le constat d'une société bloquée est pourtant bien le même. Mais Tati se montre nettement plus métaphysique que Godard et semble analyser le monde depuis le ciel sur lequel se déploie longuement le générique avant d'amorcer un panoramique sur un immeuble aux arrêtes froides et dures. Au poids du ciel chargé répondent ces immeubles construits par Tati pour un décor qui préfigure sa peur d'un monde standardisé et sans âme. Pour preuve ces affiches de sites touristiques au Brésil ou dans les îles où l'on ne propose aux touristes que ces mêmes immeubles partout. Vouloir photographier les images du vieux Paris, symbolisé par une marchande de fleurs se révèle impossible. D'ailleurs le vieux Paris n'existe plus que dans le reflet des glaces où viennent se refléter successivement, pour ceux qui veulent bien les apercevoir et dans une géographie improbable, la tour Eiffel, l'Arc de Triomphe, la Concorde ou Montmartre. La standardisation est partout depuis les chapeaux à fleurs des touristes américaines jusqu'aux voitures identiques prises à la même heure par des employés au costume identique en passant par la voix stéréotypée des hôtesses d'aéroport.
Si l'immeuble où est invité Hulot par un ancien camarade de régiment comporte, lui aussi, d'improbables façades de verre, c'est qu'il n'y a rien à cacher, chacun accomplissant au même moment les mêmes actes : enlever sa veste, regarder la télévision et probablement montrer ses souvenirs de vacances.
Pour contrer cet univers éminemment sérieux et ennuyeux, une seule stratégie : le jeu. Le jeu musical d'abord avec, dès le générique, un rythme syncopé suffisamment imprévisible. Le jeu sonore ensuite qui ne cassera jamais avec le goût de Tati pour l'observation des différences entre les bruits extérieurs ou intérieurs, pour l'incongruité des bruits des chaises en skaï ou des ordinateurs boutonneux à l'écho métallique.
Le jeu des faux semblants aussi : on croit voir du même alors qu'il y a de la différence. On est persuadé d'apercevoir Hulot dans l'aéroport, grand échalas avec un imperméable beige et un long parapluie noir. Mais, lorsqu'une mystérieuse inconnue interpelle en anglais "M. Hulote", elle, puis nous, découvrons un personnage de méchante humeur qui n'est pas celui que l'on croyait. Seront victimes du même gag les représentants "de la porte qui ne fait pas de bruit" qui confondent Hulot et un hurluberlu sans gêne puis, plus tard, M. Giffard qui courant derrière Hulot après l'avoir raté de nombreuses fois dans son entreprise fera se détourner un noir vêtu du même manteau beige.
Finalement tout est une question de point de vu : une façade où règne le sérieux et l'identique alors qu'une observation plus minutieuse révèle le comique de la situation (le voyagiste affairé sur son tabouret roulant se révèle, vu de derrière, un curieux danseur).
Comme le notait Michel Chion dans son analyse sur le son au cinéma, toute la stratégie de mise en scène de Tati vise à éliminer l'intrusion du hors-champs pour inclure un gag presque imperceptible dans un plan large. Ainsi le reflet des monuments de Paris dans les vitres de l'espace inventé par Tati ne renvoie à aucun Paris réel hors champ. Tati n'affectionne rien plus que ces plans larges sur un monde grouillant d'activité : l'aéroport, les bureaux de chez Giffard et évidemment le restaurent dancing du Royal Garden.
Si Tati redoute le sérieux du monde, il sait aussi en voir la poésie à l'œuvre. Une poésie du dérèglement dans la fête et une poésie un peu artificielle mais pas désespérée à l'image de ces brins de muguet artificiels que la jeune touriste découvre au fond de la boite du cadeau offert par Hulot et auxquels font échos les élégants lampadaires au-dessus du bus qui bientôt s'éclaireront.
Tati disait de son film qu'il se décrivait plus par le dessin que par la parole et qu'il racontait l'histoire d'une droite qui s'incurve. On a bien en effet dans la première partie des personnages prisonniers de l'architecture rectiligne (bureaux en forme de boite, acenceur kidnapeur...) alors qu'au Royal Garden, quand l'arcitecture se déglingue, chacun peut s'inventer un espace qui lui est propre.
© Jean-Luc Lacuve, le 22/08/2002
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Regard de François Ede, artisan de la restauration de Playtime
Playtime est formellement fascinant, dominé par l'obsession de la composition. La ligne prime sur tout. Les personnages suivent des formes géométriques, d'abord à angle droit et, petit à petit, la ligne commence à s'arrondir, le film progresse vers le cercle du carrousel final. C'est une réalisation ambitieuse avec plusieurs actions dans le même plan. Tati n'accompagne pas les gags. Parfois, il ne les conclut pas. Il ne fait pas de gros plans. C'est au public de décoder, de décrypter l'image.
Tati casse le jouet du spectateur. Le personnage de Hulot, il le gomme, le démultiplie. Ça l'emmerdait un peu de faire l'acteur, il sentait bien qu'il avait vieilli et que ça n'était plus la même chose. Surtout, son vrai désir, c'était la mise en scène. Il expliquait très bien aux autres ce qu'il voulait en matière d'interprétation, il donnait des indications au moindre figurant, leur mimait leur propre rôle. Il partait de l'arrière-plan, réglait toutes les actions simultanées dans des scènes où il y avait parfois deux cent cinquante figurants et, à l'arrivée, il y avait très peu d'erreurs.
Tati a fait de longs essais de matériel avant de choisir le 70 mm, qui était surtout utilisé pour les films d'aventures, les péplums. Il disait : "Je ne vois pas pourquoi on l'utiliserait pour les westerns, et pas pour filmer un type endormi à son bureau." C'est un format qui rend l'impression, voulue par Tati, d'un homme écrasé par l'architecture. La surface de l'image à la projection est quatre fois plus grande, le moindre détail se voit. Tati avait travaillé avec une précision presque mathématique et son film a beaucoup souffert par la suite des différentes coupes et de la commercialisation de versions tronquées (dans certaines vidéos, l'image a été recadrée et amputée de près de 50 % de sa surface). Le plan ci-dessus est assez représentatif du travail de restauration que nous avons mené avec Sophie Tatischeff la fille de Jacques Tati, décédée quelques mois avant l'achèvement des travaux. Nous avons rallongé la scène d'une minute pour rétablir la compréhension. Au sol, il y a des zones claires où l'on entendait le bruit des pas, et des zones sombres où on ne l'entendait plus. Cet effet n'était plus très évident avec les coupes, la scène resserrée perdait son sens de labyrinthe kafkaïen. Si l'on s'en tient au scénario, Playtime est un film qui devait faire plus de trois heures, à l'origine. Tati en a d'abord projeté une version de 2h34, en décembre 1967, qu'il a immédiatement ramenée à 2h15. Il avait déjà coupé au moment du tournage en arrachant quarante pages du scénario. La fin du film est relativement improvisée par rapport à ce qu'elle aurait dû être. Il était même prévu qu'au dernier plan le personnage sorte de l'écran et soit projeté en ombre chinoise sur les murs de la salle, histoire de montrer que le film s'inscrivait dans la vie réelle. Tout était prévu, une société travaillait sur les trucages, mais Tati a fini par renoncer. Il n'en avait plus les moyens.
Tati voulait porter à l'écran un monde monochrome et il s'est donné un mal de chien pour rendre la dominante de gris de cette architecture moderne. A l'époque, la mode était à l'aluminium brossé mais c'était impossible à éclairer et à filmer. Tati a donc fait photographier des panneaux d'aluminium et en a fait des agrandissements géants. Il a tapissé son décor de papier photo comme s'il s'agissait de papier peint. Playtime, c'est de la haute couture et, du coup, le travail de restauration aussi. Il a fallu un étalonnage très pointu pour retrouver les couleurs qu'il avait souhaitées. Les copies restantes étaient en mauvais état, rayées, déchirées. Comme il n'y avait pas de labo pour le 70 millimètres en France, le négatif est parti en Espagne, où personne ne surveillait ce qui se passait. Quand il y avait des incidents, ça ne se savait pas. Cinq, six minutes du film ont nécessité un traitement numérique qui tient de la chirurgie de pointe.
Le décor était gigantesque. Comme le Paris qu'il voulait filmer n'existait pas encore, et qu'il n'était guère pratique d'aller tourner à Orly ou à Cergy, il a construit sa propre ville sur 15 000 mètres carrés, sur le plateau de Gravelle, au coeur du bois de Vincennes. Mais l'immensité des perspectives devait beaucoup à un véritable travail d'illusionniste, des trucages visuels quasiment inspirés par les numéros de cabaret du XIXe siècle, des tours de magie de Robert Houdin. Rien ne se voit. Chez Tati, la sueur du trucage ne se sent jamais. Et ce décor où tout est en verre est un fantastique défi à la lumière. Comme le ciel était visible de partout, les raccords étaient extraordinairement difficiles. Il fallait attendre une météo identique. C'est en partie pour ça que le tournage a duré si longtemps. Pour que tout soit parfait, on ne pouvait guère compter sur plus d'un plan par jour. Et durant l'été 1965 où le tournage a débuté, le temps était détestable. Les orages ont sérieusement chahuté le décor."
Source : cineclubdecaen.com