Synopsis
Deux adolescents, Marie et Jésus, s'aiment et désirent vivre ensemble. Mais leurs parents respectifs refusent cette idée. Lorsque Marie se retrouve enceinte, sa mère l'oblige à avorter et la sépare de Jésus...
Générique
Réalisateur (1)
Acteurs (11)
Production et distribution (2)
- Coproduction : Office de Radiodiffusion Télévision Française (ORTF)
- Distribution France : Capital Cinéma
Générique détaillé (6)
- Scénariste : Philippe Garrel
- Dialoguiste : Philippe Garrel
- Directeur de la photo : Michel Fournier
- Auteur de la musique : François Garrel
- Ingénieur du son : Jacques Dumas
- Producteur associé : Claude Berri
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Mentions techniques
- Type : Long-métrage
- Genre(s) : Fiction, Expérimental
- Thèmes : Adolescence, Religion, Parabole, Maternité
- Langue de tournage : Français
- EOF : Non précisé
- Nationalité : 100% français
- Année de production : 1967
- Sortie en France : 08/03/1972
- Durée : 1 h 14 min
- Etat d'avancement : Sorti
- Agrément : Inconnu
- Formats de production : 35 mm
- Type de couleur(s) : Noir & blanc
- Format son : Mono
Actualités & distinctions
Sélections (3)
BAFICI - Festival international du cinéma indépendant de Buenos Aires
Argentine, 2018
Rétrospective Philippe Garrel
A propos
En 1967, Philippe Garrel a 18 ans. Il est encore un peu seul. Il fait dans son coin des films où il cite Lacan et le situationnisme. Il lit Nietzsche et Rimbaud, visite le Louvre en veste de velours épais, chemise à jabot et bottes noires pour y apprendre les effets de la lumière sur les femmes laiteuses d'Ingres ou sur celles éclairées à la bougie chez La Tour. Il est déjà très entouré mais seul: il croit que Dieu n'est pas mort et qu'il fait des films sous le nom de Jean-Luc Godard.
Philippe Garrel, qui s'est auto-désigné comme son fils spirituel, voit bien qu'il est inu-tile de jouer éperdument les Christ Pantocrator alors que le fils de Dieu ne peut être désormais qu'un ange déchu et maigre, prêchant dans un désert moderne. En 1967, Garrel a rencontré Zouzou, une Mademoiselle âge tendre qui pose pour les magazines. Avec elle, il commencera à inventer une famille, une mythologie qui, de Nico à Pierre Clementi, du peintre Frédéric Pardo à Tina Aumont, constitue la plus belle crèche vivante de hippies acidulés jamais croisée dans le cinéma français.
En 1967, Philippe Garrel a 18 ans et il est fier. Il vient de réaliser pour Zouzou son premier long métrage: Marie pour mémoire, pour lequel Michel Simon le serrera dans ses bras comme un nouveau Vigo sous les quolibets du public du festival d'Hyères, qui jugeait scandaleux ce cocktail Molotov. Marie pour mémoire ne sera jamais distribué. Pendant longtemps d'ailleurs, les films de Garrel seront projetés de façon occasionnelle (à l'Olympic, au Studio 43, à la Cinémathèque chaque soir de Noël ou chez Andy Warhol), mais ne sortiront pas.
Corps essentiels. Trente- deux ans après, ce film petit pain voit enfin ses séances se multiplier pour une semaine (seulement) à Paris, une semaine sainte à l'Action Christine (qu'il serait de bon ton de rebaptiser l'Action Christique). L'attente n'était pas vaine: le film balaye d'une main, ou d'un majeur, le conformisme aberrant de notre époque. Car, pour mémoire, Marie crie, crache, bave, hurle et prie: Christ Christ! Marx Marx! Marie Marie, toute abîmée" Ramenant le monde à quel-ques corps essentiels, c'est un manifeste où tout est confondu dès le départ: la rencontre de deux couples équilibrés dans une agence matrimoniale est inversée par erreur et produit deux couples hystériquement assortis, deux figures de radicalité: l'un, Blandine et Gabriel, rationnels jusqu'à l'échec; l'autre, Marie et Jésus, romantiques jusqu'à la folie. Sur le terrain vague où la cité les a rejetés, tout leur paraîtra inadmissible. Ils ont 18 ans. Ils prennent feu. Voilà pour le scénario. Dès lors, Garrel filme ces corps abandonnés en prenant la pauvreté comme discipline heureuse. Heureuse, vraiment? Non, car incomprise et ascétique, cette discipline induit une haute solitude qui mènera Marie et Garrel à la psychiatrie et aux électrochocs.
Schizophrénie. Philippe Garrel voulait ce film prophétique. Aujourd'hui, la scène (filmée comme un viol) où Marie subit des électrochocs par deux infirmiers, glace le sang de ceux qui se souviennent qu'à la fin des années 70, le cinéaste connaîtra en asile des traitements analogues. Mais prophétique, le film l'est aussi en ce qu'il préfigurait les questions que posera, au sortir de 1968, l'association gau-chiste Vive la révolution: que deviennent nos corps et nos désirs dans la doctrine révolutionnaire?
Ainsi, Marie pour mémoire, depuis son titre religieux et impie, rêve la femme dans un bric-à-brac biblique qui pousserait n'importe quel théologien au suicide: Marie est confondue avec Marie-Madeleine, Joseph avec Jésus, ils sont amants, incestueusement. Tout est renversé, déplacé, la schizophrénie des enfants de Marx et du Coca-Cola prend le texte saint à la gorge, dans un désordre pop digne de Martial Raysse. Garrel n'avait pas lu la Bible, il rêvait d'une sainte Trinité qui lui venait du Louvre, une mystification du Christ érigée sur l'esthétique de sa maigreur toute politique. Et il appuie à fond sur les métaphores jusqu'à ce qu'il ne reste plus qu'un cri ou une verrue.
Solitude. Entreprise hébétée d'injection de tous les discours, y compris les plus boy-scouts et les plus aliénants, le film avance sans parole d'Evangile, sans doctrine, ne rêvant que de silence, celui de l'enfant, de l'apprenti ou de celui qui suit la jouissance. Parfois l'atteint, dans une mise au tombeau filmée burlesque station Filles-du-Calvaire; dans un plan volé du lit où Zouzou pleine de grâce sourit de solitude; quand Marie et l'enfant apprennent l'espéranto magnifique et ultime plan du film. Les mots sont effectivement renvoyés à la chair meurtrie qui en a souffert et demande des comptes. Le salut peut commencer: Marie, crucifiée, dernière femme, revient. Tout le cinéma de Garrel est déjà là. Amen.
© Philippe Azoury, Libération